6.12.08

 

Viviane.............

Voici mon histoire..........est l'intitulé du texte suivant reçu aujourd'hui..




A. G., avait écrit: “Un jardin d’art brut qui dérange.




Un petit bout de terrain est au coeur d’un conflit de voisinage: une amatrice d’art brut y a créé son monde imaginaire. Mais voisins et maire en appellent au respect du paysage”




Deux morceaux de bois chevillés l’un à l’autre forment une silhouette à côté d’un petit pont qui enjambe le fossé. La statue semble vous inviter à passer. De l’autre côté, un petit bout de terrain occupé par des ronciers, des arbres, du lierre, des broussailles. Un petit bout de terrain, défriché par endroits, qui suit la pente de la route.




Ses personnages et ses installations étranges et hétéroclites, il y a le roi Arthur, mélange de végétal et de métal, un tronc d’arbre d’un mètre de hauthabillé d’une chaussure, d’un bouclier et d’une couronne (un souvenir de l’ancien propriétaire).




Plus loin, ce sont les Triplettes de Belleville, les héroïnes du célèbre dessin animé: tronc d’arbre, chapeaux et canne à pêche: en face, la photo d’un “Champion” trône sur un vieux Solex repeint en jaune poussin. Tiens, revoilà les Triplettes, version collage cette fois, accompagnées d’une collection de grenouilles en tous genres et de toutes les tailles.




Un peu plus loin, une pergola de bois accueille un tableau figuratif représentant un coucher de soleil et deux petits personnages représentant les amoureux des bancs publics (de Brassens). Les arbres alentour sortent des photos ou des peintures illustrant des arbres.




Derrière les bâches et les panneaux de bambou séché, les assemblages se multiplient: une belle coque de bateau, une bouteille de plastique en bout de mât, des morceaux de vaisselle au décor maritime, des bouts de filets récupérés sur les rivages, des poèmes protégés dans des pochettes plastifiées, des soldats miniatures avec leur chateau fort, des bouts de tissu où courent les écritures, et un coin de plage symbolisé par un parasol et un fauteuil. C’est le monde de Viviane.




Cheveux courts, voix enjouée et air décidé, Viviane, la dunkerquoise, est installée définitivement à M. depuis un an. Cette ancienne éducatrice qui a travaillé dans la formation pour adultes se préparait à une retraite paisible, en quittant la grande ville de Lille pour sa petite maison qui srplombe la vallée.




De chez elle, Viviane admire le pont de chemin de fer au-dessus du G., les écluses sur la rivière et les hauteurs du village voisin. “C’est magnifique !” s’exclame-t-elle avec entrain.




jouxtant son jardin, un terrain boisé de 4000 m2, acquis par son fils. C’est là que Viviane a décidé de s’exprimer: “J’aime l’art brut et la poésie. L’écriture, c’est mon truc depuis toujours. Quand je vivais dans le Nord, j’ai longtemps animé des ateliers d’écriture. Nous exposions parfois nos travaux, avec des peintres et des photographes. On évoquait le surréalisme, l’Oulipe, Pérec. L’art doit être accessible par tous et visible par tous” défend Viviane.




il y a quelques mois, parce qu’on lui a refusé l’installation d’une caravane sur ce terrain classé en zone ND, elle a décidé de laisser libre cours à son penchant pour l’art brut. “Le facteur Cheval, vous connaissez ? Son oeuvre a frappé mon imagination.”




La caravane, qui servait aussi à héberger ses enfants le temps d’un week-end (la maison étant trop petite) contenait une multitude de trésors accumulés depuis des années. “C’est comme ça, je garde tout, et j’aime créer et détourner les objets”.




Un peu dépitée, Viviane s’est sentie comme Don Quichotte à l’assaut des moulins. Elle s’est lancée à corps perdu dans la création de ce petit monde afin de trouver une destination à tous ses trésors. Certains objets ont trouvé leur place in situ, transformés d’un coup de baguette en statue, imbriqués dans une construction iconoclaste.




Mais voilà, les voisins de Viviane n’aiment pas ce genre d’art. Surtout pas le brut, celui qui nie toutes les conventions, échappe à toutes les règles, et qui, sous ses mains, ressemble à un vrai bazar. Un bazar composé de toutes sortes d’objets, de papier, de ferraille, de plastique, de bois, de ciment: toutes sortes d’objets colorés et détournés de leur sens d’origine. en fait, viviane souhaite exprimer ses émotions, sa colère, parfois, tout simplement. Mais surtout pas un quelconque sens de l’esthétisme ou du figuratif.




Les voisins lui font savoir que cela n’est pas à leur goût, en appellent à l’arbritage du maire. Viviane se sent espionnée, parfois interpelée lorsqu’elle est sur son terrain. Elle ne se sent pas respectée. Mais elle persiste dans ses créations. “Je ne suis pas quelqu’un qui recule quand on l’attaque”.




eEle s’adresse à la DDE, pour savoir ce qu’elle a droit, ou non, de faire. Puis elle s’inscrit à l’opération “Insolites mondes d’artistes” et reçoit en novembre la visite de quelques dizaines de personnes.




“ça m’a fait du bien. J’ai vu des gens de la région, mais aussi de L., de M., de S-B. En général, le public a beaucoup apprécié et toutes les remarques du livre d’or que je proposais sont positives.”

Le maire de la commune aussi lui rend visite lors de ces portes ouvertes. Mais quelque temps plus tard, il lui demande de faire en sorte “que ces aménagements ne soient plus visibles de la rue”. Des courriers de la mairie lui stipulent que sa “pratique de l’art brut” est tout-à-fait incompatible avec “le respect des règles énvironnementales et celles du respect du voisinage”.




On lui conseille de planter une haie bocagère mais Viviane préfère reculer ses statues ou prendre son pot de peinture verte pour tenter de camoufler ces installations.




“Que l’art dérange, c’est bien. Pour moi, l’art brut doit choquer et déranger, mais il doit aussi être vu, sinon, à quoi ça sert ?”




viviane fait appel à un Médiateur de la République pour tenter d’expliquer sa démarche”. “Il a écrit à mes voisins. Quand je suis arrivée ici, je trouvais les gens accueillants, on pouvait leur parler facilement et se rendre mutuellement service...” dit-elle avec une pointe de regret.




Peu à peu, Viviane accroche des bâches sur son terrain pour camoufler son petit monde, investit dans un grand portail pour cacher sa pergola. Le résultat est encore plus voyant et va à l’inverse de ce qu’elle souhaitait au départ: “c’est le chien qui se mord la queue.”




Quelques mois plus tard, la tension continue de monter. “L’affaire” débattue déjà à trois reprises au conseil municipal est à nouveau évoquée, fin janvier.




Le maire annonce qu’un huissier s’est rendu sur le terrain pour faire un constat. Pour lui, Viviane doit se mettre en conformité avec l’environnement.




aujourd’hui, Viviane garde le sourire, même si la situation conflictuelle commence à peser. Pour vivre heureux, vivons cachés: la commune de M. a-t-elle fait de cet adage sa devise ?




“Heureusement, sourit Viviane, j’ai d’autres voisins qui me soutiennent et des gens qui comprennent ma démarche. Est-ce qu’on interdit les nains de jardin sur les pelouses, les illuminations de Noël dans les propriétés ? Je fais tout pour qu’on ne me voit pas de la route. Mais, en même temps, un artiste caché au fond des bois, c’est un ermite, ce n’est plus un artiste

Comments:
J'ai cette année, comme je le fais depuis 2006, fait mon tour de France de l'Art Brut, qui m'a menée, sur les conseils d'un autre chercheur, jusqu'à la maison de Danielle Jacqui. Une maison entièrement décorée par l'imaginaire de sa propriétaire, qui donne envie de s'arrêter et de se dire que le détour valait la peine. De l'extérieur à l'intérieur, tout est à regarder, comme une maison qui se raconte, qui révèle son histoire, ses secrets, qui se fait coquette, un livre, un paysage, contenus dans des détails colorés.
Chercheurs d'art brut nous sommes, pour ces oeuvres originales, insolites, qui se cachent au détour d'un chemin, qui ne bénéficient que rarement des faveurs des médias. Comme celle de Jean Linard, qui n'est pas non plus indiquée par un panneau, comme la Demeure du Chaos, poursuivie par la mairie jusqu'en justice, qui, si elles ne sont pas art brut, gênent parce qu'elles sont hors normes. André Malraux n'est plus, qui a convié le Palais Idéal du facteur Cheval au rang d'oeuvre classée, vers laquelle se dirigent des millions de visiteurs du monde entier: qui protégera les artistes et permettra leur libre expression, comme des cathédrales dans le conformisme actuel ?
 
J'ai cette année, comme je le fais depuis 2006, fait mon tour de France de l'Art Brut, qui m'a menée, sur les conseils d'un autre chercheur, jusqu'à la maison de Danielle Jacqui. Une maison entièrement décorée par l'imaginaire de sa propriétaire, qui donne envie de s'arrêter et de se dire que le détour valait la peine. De l'extérieur à l'intérieur, tout est à regarder, comme une maison qui se raconte, qui révèle son histoire, ses secrets, qui se fait coquette, un livre, un paysage, contenus dans des détails colorés.
Chercheurs d'art brut nous sommes, pour ces oeuvres originales, insolites, qui se cachent au détour d'un chemin, qui ne bénéficient que rarement des faveurs des médias. Comme celle de Jean Linard, qui n'est pas non plus indiquée par un panneau, comme la Demeure du Chaos, poursuivie par la mairie jusqu'en justice, qui, si elles ne sont pas art brut, gênent parce qu'elles sont hors normes. André Malraux n'est plus, qui a convié le Palais Idéal du facteur Cheval au rang d'oeuvre classée, vers laquelle se dirigent des millions de visiteurs du monde entier: qui protégera les artistes et permettra leur libre expression, comme des cathédrales dans le conformisme actuel ?
 
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